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La Mare Rouge - Page 22

  • Rockit


    Herbie Hancock, Rockit


    deux jours de suite,

    à 7h15,


    station de métro Hôtel de ville-Louis Pradel.

    Et pour la première fois, je me demande qui a ce pouvoir de concevoir la playlist matinale des TCL.

     

     

  • Bleus

    Quand je tangue comme ça,

    Je me cogne un peu aux entournures,

    Ca n'est pas très confortable.

    Au réveil, j'ai des bleus (Il faut dire que je marque facilement).

     

    Il me dit ménage-toi.

  • Soupe

    Pamela se rêve cerise sur les gâteaux mais doit bien se rendre à l'évidence, le plus souvent elle n'est que cheveu sur les soupes.

  • Post-vacances

    Non mais je t'assure que je fais de drôles de rêves de post-vacances en ce moment.

  • Autre chambre.

    Alors, j'ai vu du ciel. J'ai entendu des oiseaux. J'ai senti arriver l'orage, les nuages avançaient très vite. J'ai senti l'air venteux pénétrer dans ma chambre. J'ai vu le vent s'engouffrer dans les branches des arbres et les affoler, sous ma fenêtre.

    Allongée sur mon lit, adossée à mon coussin, je vois les trois derniers étages de l'immeuble d'en face. Je perçois les sons feutrés de ses appartements, les bruits des familles, le bruit des télévisions, le bruit des radios. Mais ce sont des bruits au loin. Ce ne sont pas des bruits gênants. Ce sont des bruits rassurants de vie de gens.

    J'ai pensé à Fenêtre sur cour, j'ai pensé au Décalogue Tu ne seras pas luxurieux. Les fenêtres sont nombreuses, en face. Qui derrière ?

  • I don't need money, I don't need a car...


     

    Et, à 11 ans, je fredonne :

    - Mon dieu, j'peux même pas jouir.

    - Tant pis pour toi, il faut dormir.

  • Alliance

    L'été 1986, en Auvergne, vers Brioude, au camping de la Villette,  je me suis baignée dans l'Allier avec ma soeur, mon père et ma mère comme de nombreux étés. 

    J'ai nagé dans l'eau fraîche un moment, puis je suis revenue sur la rive. Je me suis alors rendu compte que j'avais perdu l'alliance de ma mère, qui était à mon annulaire droit. Un gros anneau d'argent qu'elle m'avait prêtée (comme elle me prêta, plus tard, une bague de fiançailles à pierre mauve que je perdis de nouveau).

    Je n'osais pas avouer tout de suite cette perte à mes parents.  Je tentais, dans un premier temps de retourner à l'eau seule pour fouiller le fond vaseux et pierreux , mais la quête me parut rapidement absurde et vaine.

    Mon père était furieux, d'abord contre ma mère qui m'avait confié l'anneau de mariage, puis contre moi et ma négligence fautive.

    Nous l'avons cherché, un temps, à quatre, nous avons soulevé les pierres, parcouru plusieurs fois le court chemin qui liait notre emplacement à la rivière, ce fut inutile.

    La rivière m'avait volé ma bague.

    Dans la famille, les alliances des femmes sont avalées par les herbes et les eaux.

     

     

  • Vogue

    Car certains Croix-Roussiens, oui, semblent porter leurs enfants comme des accessoires de mode.

  • J'arme

    Aujourd'hui, je réapprends à lire l'heure à mon poignet. J'ai acheté une montre dorée à remontoir mécanique, à l'aspect suranné, place du Jeu de la balle, à Bruxelles. Je l'ai trouvée sur une table de brocanteur. C'est elle que je cherchais depuis longtemps sans savoir à quoi elle ressemblait exactement.

    Aujourd'hui, je réapprends à lire l'heure, à l'ancienne. Je plie mon avant-bras gauche en direction de mon buste, un peu en-dessous de la poitrine, pour lire le temps.

    Je dois d'abord prendre l'habitude de remonter régulièrement le mécanisme de la montre pour ne pas perdre les minutes. Je ne sais pas encore à quel rythme je devrai exécuter ce geste consistant à tourner la couronne de remontoir pour armer ma montre. J'apprends que l'on dit "armer" sa montrer quand il s'agit de la remonter manuellement pour tendre le ressort de barillet afin qu'il puisse accumuler de l'énergie qui sera ensuite distribuée dans le mouvement.

    Aujourd'hui, à 10h 21 min, j'arme pour la première fois.

    J'attends maintenant que l'on me demande l'heure pour avoir le plaisir de renouer avec le geste perdu.

  • I love my cat

    Trois de mes paires de chaussettes ont un trou la même semaine, je ne retrouve plus une seule petite cuillère dans le tiroir à couverts ou sur le séchoir à vaisselle, il n'y a plus d'encre rouge dans mon stylo Bic.

    Le chat de la maison, allongé dans l'entrée sur un coussin portant l'inscription I love my cat, me regarde en coin. Je suis sûr qu'il mijote quelque chose. 

     

  • Johnny Cash

    Depuis quelques jours, ce qui est au mur, chez moi, se détache et tombe. Les posters, les tableaux, les photos et les cartes postales.

    Mon appartement est certainement en état de mue.

    Je suis curieuse de savoir quelle nouvelle peau il est en train de s'inventer. Mais, j'observe quand même avec inquiétude ma précieuse affiche de Johnny Cash. J'aimerais garder quelques traces de mon ancien intérieur...

    A suivre.

  • Les images fantômes

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    Tout ce qui apparemment raté,

    loupé,

    manqué,

    imparfait,

    bancal,

    emporte instantanément ma tendresse et mon affection.

    Les mauvais clichés, les images fantômes à lire en négatif, ne sont pas vains. Je les conserve précautionneusement.

    Leur heure viendra.

  • Instagram

    La fille, à la télé, elle est brûlée sur une surface représentant 40% de son corps. Elle a brûlé un jour de carnaval. Une cendre de cigarette a fait flamber son costume de mouton. Depuis, elle fait des poses de mannequin avec ses brûlures apparentes, sur Instagram, parce que ça l'aide à accepter son corps.

  • Les papillons de ma jeunesse

     


     

    Yeux bleus qui pleurent quand on te photographie. Petite fille tu te serres contre moi et je te dis Tu es grande maintenant tu dois apprendre à te débrouiller toute seule En colonie de vacances tu pleures pendant la boum parce que ta jupe en papier crépon s’est déchirée et que tu ne veux pas danser la chorégraphie apprise sur l'air d'Alexandrie Alexandra Ta petite voix tu as 6 ans sur la bande magnétique audio quand on enregistre des histoires avec les musiques d’Ennio Morricone et qu’on invente de fausses interviews On se moque de Miss France en la parodiant On fait la musique du générique avec des sons de bouche on éclate de rire avant la fin On reçoit des talkies-walkies à noël et on se parle d’un bout à l’autre de la maison mais ça ne marche pas bien Je te dis un jour dans la voiture que le verre de vin et la carotte qu’on laisse sous le sapin le jour de noël et que l’on retrouve bu et grignotée au retour sont une supercherie des parents pour nous faire croire au père noël ça te fait pleurer Je regrette aussitôt mes mots Un jour tu as 4 ans tu pars toute seule alors que je suis censé veiller sur toi dans le quartier du Mont-Gaillard Je  tremble de peur à l’idée qu’il te soit arrivé quelque chose qu’on ne te retrouve pas On te cherche partout et une dame te tenant par la main finit par te ramener à nous Tu expliques que tu voulais aller à Auchan Un autre jour M. Navarro le directeur de l’école te dit d’arrêter de le dévisager tu ne comprends pas ce que ça signifie dévisager tu continues de le regarder dans les yeux et il te traite d’insolente.

  • Le fil dans le chas d'une aiguille

     

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    Quand j’étais enfant,
     
    je m’allongeais sur mon lit et je chantais Non rien de rien non je ne regrette rien,
    je lisais La Potion magique de Georges Bouillon,
    je cuisinais des Cracraboguettes,
    j’avais une bonne note en français, j’avais une mauvaise note en maths,
    je pleurais parce que mon ami François avait voulu m’embrasser de force sur la bouche en me tenant les deux bras au sol,
    puis j’étais surprise quand il jetait dans mon jardin un savon en forme de cœur pour se faire pardonner,
    j’écrivais l’histoire d’un petit garçon qui faisait une fugue avec son chien,
    mon poisson rouge s’appelait Alphonse et il aimait le son du saxophone,
    mon chat s’appelait Charlie, puis Isidore puis Bacchus,
    je trouvais que mon père ressemblait au cow-boy des village People,
    je jouais dans les Hautes herbes avec Marilyn Fouache,
    j’aimais quand ma mère organisait une chasse aux trésors et que l’on devait trouver, avec ma sœur, un objet insolite dans la nature.

    J’essayais, patiemment, de glisser un fil dans le chas d’une aiguille.
     
     
  • Quand j'étais petit, je n'étais pas grand

    Chanson :

    Quand j'étais petit, je n'étais pas grand

    Je montrais mon cul à tous les passants

    Maman me disait Veux-tu le cacher !

    Moi, je lui disais Veux-tu l'embrasser !

    Nous la chantions souvent, mon cousin Laurent et moi,

    et ça nous faisait sacrément rire.

    Puis, un jour, il ne pouvait plus la chanter

    car il n'existait plus.

    Alors, je la chantais toute seule.

    Mais, c'était moins drôle.

     

     

  • Tout

    Tout t'attend chez moi.