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  • Dialogue ordinaire, métro Mermoz-Pinel, 12h47.

    - Excusez-moi, quelqu'un sait pourquoi y a un arrêt de circulation sur la ligne D ?

    - Y a eu un souci voyageur.

    - Non, pas un souci voyageur, un SUICIDE voyageur, monsieur.

    - Ah, oui, un suicide voyageur, je voulais dire.

    - ...

    - C'est vrai qu'entre le souci et le suicide, y a de la marge, hein ! Haha !

    - Oui, entre le souci et le suicide, y a le temps de se passer des trucs, c'est sûr...

    - Ouais...

    - Et ça s'est passé où ?

    - Station MONTPLAISIR.

    - Ah ouais, quand même...

    - Ouais...

     

     

     

     

    Photographie parue sur la page Kenga Rex sous le titre Rare Photographs Of The NYC Underground In The 80s 

  • Larmes de tortue

    Ces papillons d'Amazonie qui butinent les larmes des tortues, c'est d'abord un tableau d'une mystérieuse beauté poétique.
     
    Puis, tu apprends que c'est le manque cruel de sodium dans cette région du monde qui pousse les papillons à harceler continuellement les tortues.
     
    Et puis, tu comprends que cette pratique finit par mettre en danger les tortues qui, très souvent aveuglées par les nuées de papillons s'abreuvant à leurs yeux, ne peuvent plus se protéger de leurs prédateurs.
     
    Et tu te dis, la mystérieuse beauté poétique...
     
     
     
     
     
     
     
    photographie : Milo Burcham

  • pigeons 2 (mouettes aussi)

    Les mouettes de la place San Marco font les crâneuses.
    Vraiment, elles manquent d'humilité.
    Elles tentent par tous les moyens de voler la vedette aux pigeons millénaires et n'hésitent pas, pour cela, à s’adonner à un photobombing effronté devant l'objectif et les perches à selfies des touristes.
    Les pigeons, quant à eux, gèrent la situation avec une distance toute ironique dans le regard (bien visible sur tous les clichés du monde si l'on prend le temps de s'y arrêter un instant).

  • Le jardin d'acclimatation

    Le petit singe de la ménagerie du Jardin d'acclimatation de Paris,

    je ne comprends pas tout de suite ce qu'il fait

    derrière la grande baie vitrée qui nous sépare de lui.

    De sa main droite, il étale une matière terreuse, sombre, sur la surface en verre.

    Il dessine quatre traits d'une vingtaine de centimètres, verticaux, espacés d'un pouce environ.

    Il va chercher derrière lui la glaise et, avec deux doigts, l'écrase de haut en bas, sur le verre.

     

    Je le vois maintenant, 

    il y a des traces de son art pariétal sur toute la longue surface de la cloison vitrifiée. 

     

    Il nous fixe de son regard noir, grave et mélancolique de primate de jardin d'acclimatation

    qui donne de mauvais rêves aux humains,

    et,

    de sa main droite,

    le petit singe de la ménagerie du Jardin d'acclimatation de Paris,

    va chercher la merde fraîchement sortie de son anus

    et

    l'étale,

    encore

    et encore,

    pour matérialiser,

    opiniâtrement,

    méthodiquement,

    toute sa pleine

    exécration de nous.

     

     

     

     

     

  • Estelle Dumortier et moi.

    Estelle Dumortier et moi,
    on a fait les folles, hier :
    On a bu du Coca-Cola.


    Pas du Coca light.
    Pas du Coca Zéro.
    Non.
    Du 100% sucré,
    du 100% caféiné.


    L'une de nous a même dit :

    Rhaaaa... je devrais faire cela plus souvent.

    L'autre a acquiescé.

    Voilà ce qu'on fait,
    en catimini,
    Estelle Dumortier et moi,
    quand nos hommes sont
    en déplacement, quelques jours.

    Ce texte est-il racheté par une pointe de culpabilité ?
    Ce n'est même pas sûr.

     

     

    image : poster de Kareem Gouda

  • Subway

    Elle trouvait étranges ces personnes qui se plaignaient que les gens fassent la tête dans le métro.
     
    - Tu ne trouves pas que les gens font la gueule dans le métro ?
     
    Qu'est-ce que les humains pouvaient bien faire dans le métro si ce n'est lire des trucs, jouer sur des téléphones, écouter de la musique dans des casques, regarder dans le flou avec des têtes de travail, de souci, de femmes en retard, d'ados blasés, de bébés enrhumés, d'étudiants ensommeillés ?
     
    Et quand bien même un de ces êtres aurait été particulièrement heureux, comment était-il censé le manifester ? En affichant un fixe sourire ravi ? En distribuant des accolades joviales en direction de ses compagnons de voyage ?  En confiant son bonheur et sa satisfaction de vivre à ses voisins de banquette ?
     
    Non, vraiment, elle ne voyait pas comment résoudre le problème des gueules dans le métro, la sienne contribuant généreusement, chaque matin, à l'ambiance frères Dardenne du trajet de 7h.
     

     
     
     
    Photo de Willy Spiller.
     
     

  • Lundi de Pâques

    Au parc de la tête d'or,

    l'enfant de 11 ans dit à ses parents, Regardez l'hippocampe ! en pointant du doigt un pélican (ils ne sourcillent pas),
    le panda roux fait exprès d'être si mignon qu'on a envie de le kidnapper au lasso (mais être si joli cache certainement quelque chose de pas net),
    le père de famille se fait disputer par sa femme car il a pris une gaufre caramel salé alors qu'elle avait BIEN dit chocolat-caramel (il baisse la tête comme son fils de 3 ans),
    la panthère d'Amour, s'il n'y avait pas la baie vitrée, sauterait à la gorge du monsieur qui fait des selfies avec sa perche devant la cage (oui, certainement),

    dans ma bouche, la barbe à papa a le goût d'un lundi de Pâques à qui tout réussit (et qui le sait un peu trop, le brigand).

     

     

     

     

    image : Joe Webb, The Cloud Eaters